CHER YOGA : 13 novembre et le Yoga

Cher Yoga,
Depuis vendredi 13 novembre, je suis invitée à divers rassemblements yoguiques pour méditer, pratiquer ensemble, parce que “Om Shanti”, ou que “la vie continue”. Je comprends et je trouve même ça génial, il est temps de se retrouver. Mais je n’en ai pas du tout envie. Je n’ai pas envie de me remettre sur mon tapis, ni même de méditer… Pourtant, la logique voudrait que je pratique beaucoup, vu que c’est le moment où j’en ai le plus besoin… Je tiens à préciser que j’ai perdu un de mes amis au Bataclan. J’avoue que je suis bien paumée. Quoi faire ?
Alexia, Paris

Chère Alexia,

Dans ce type de situation, il n’y a aucun “je devrais” ou “il faudrait”. Il y a les activités que tu fais pour ne pas laisser la destruction t’emporter (gestes du quotidien, manger, se laver, et ce qui structure au minimum syndical ta vie professionnelle). Ces activités, tu te dois de les continuer, même par devoir, même sans amour ou sans entrain particulier.

Pour le reste, c’est toi qui vois ! La pratique des postures, des respirations, des méditations, ne sont que des exercices ! Ils nous apprenent à nous ancrer au présent, pour, ultimement, réaliser notre identité profonde – qui n’est pas notre corps biographique.

Tu as toujours deux choix face au présent, surtout lorsqu’il est douloureux : la fuite ou la confrontation. L’un n’est pas meilleur que l’autre. Seulement, garde en tête que ce qui n’a pas été regardé en face et vécu réellement réapparaîtra un peu plus tard, peut-être sous une autre forme. Il n’est pas possible de laisser la proverbiale poussière sous le tapis. Mais cette acceptation peut avoir lieu quand tu es prête ; surtout pas quand tu te juges et te compares à une supposée norme.

Pour beaucoup d’entre nous, il est rassurant de se retrouver, de “communier”, pour ne pas se confronter à la solitude, profonde, existentielle, qui fait que personne d’autre que toi à un moment précis ne ressentira jamais ce que tu ressens. C’est aussi une illusion, une manière de fuir l’intériorité, de fuir la peur la plus profonde qui soit pour nous humains, puisqu’elle représente l’ultime absence de contrôle : celle de la mort.

Ce qui s’est passé à Paris vendredi 13 novembre nous met face à cette peur, et à ses ramifications (peur du silence, de la solitude, du manque, de l’autre, etc). La plupart d’entre nous ne sommes pas armés pour l’accueillir. Ceux qui n’ont pas de lien direct à l’évènement se projettent, s’imaginent, dans cet instant de destruction, ‘à la place de’, ou avec des ‘si’… Dès 3 ans, les enfants aiment jouer à se faire peur en se racontant des histoires. Parfois, ils continuent en grandissant.

13 novembre paris
Alors fais ce dont tu as besoin, envie, ce qui te semble juste pour toi – dans la mesure où tu ne te laisses pas entraîner extérieurement par la destruction. Des trois énergies (Trimurti), création (Brahma), préservation (Vishnu) et destruction (Shiva), force-toi à rester, même superficiellement, même matériellement, dans celle du milieu. C’est la seule injonction.

Et souviens-toi : tout passe. Anitya.

x’om,
Débo


Cher Yoga ouvre le courrier des yogis francophones : débutant.e.s, confirmé.e.s, curieu.ses.x ou réfractaires, envoyez vos questions ! Qu’elles portent sur la pratique de près ou de loin, qu’elles soient terre-à-terre ou mystiques, Débo tentera d’y répondre. La règle du jeu : sans recette miracle, avec humilité, et des pincettes un peu décalées, ses réponses pousse la réflexion à d’autres questions. Utilisez l’espace des commentaires sous chaque Q&R, l’email, ou Facebook, pour envoyer vos questions.

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